dimanche 9 janvier 2011

Neuvième Entretien

Stare iubes sempernostrum tibi, Flora, penem : Crede mihi, non est mentula quod digitus.
Martial.

Félix Niesche: Monsieur l'abbé, cette fois ça à l'air grave, et pour les infortunés qui nous lisent sans savoir le latin, pourriez vous, s'il vous plaît, traduire ce qu'il lui dit le Martial à la Flora?
l'Abbé Tymon de Quimonte:.hem..Bien pour vous être agréable mon fils:  "Tu ordonnes, Flora, que notre queue soit toujours dressée : crois moi, une bite n'est pas un doigt."
F: Très chic. Et auparavant, qué dice?
l'abbé:  "Pour qui te mets-tu en quatre, Flora, en t'épilant le cul?"
F: Excellent ! Vous voyez, monsieur l'abbé, j'ai accédé à votre vœu, et ôter ces sempiternelles histoires de strings qui vous portaient sur le système.
l'abbé Flagrante delicto de mauvaise foi, mon fils!  Qui vous délectez dans la Fragrans feminae..
F: Femelle qui désapprend la modestie qui seyait tant à son sexe, mais ne se contente pas, hélas, d'épiler sa nudité, elle enfle sa nullité jusqu'au firmament.
l'abbé:  Mon fils, Mens agitat Molem, cette relégation du principe viril fait suite à un assaut méthodique de tout ce qu'il y a de plus obscur dans l'âme humaine.  Ne conviendrait il pas dès lors, de s'efforcer d'en pénétrer les arrières plans ténébreux?
F:  Quoi d'autre que la deuxième loi de la thermodynamique : l'entropie croissante, la victoire irrémédiable du désordre?
l'abbé:  Mon fils, Pascal a dit : "nous avons beau enfler nos conceptions au delà des espaces imaginables, nous n'enfantons que des fantômes au prix de la réalité des choses."
F:  Il est vrai, et les révolutions sidérales me font désespérer des révolutions de sang. Car elles mènent à l'Eternel Retour du même.
Je ne saurais en tout cas m'abaisser à croâre dans les arrières plans des arrières mondes transcendants.  Toutes les fumeuses consolations post mortem.
l'abbé : Péché d'orgueil mon fils. De plus, je ne vous ai jamais invité à espèrer dans le Trépas, à trespasser de vie à mort, mais à trespasser du siècle : lâcher prise, délaisser l'exténuante belligérance, ce gôut pour la politique révolutionnaire, qui est le domaine de la puissance, pour accéder à l'éveil spirituel, domaine de la connaissance.
Envoloppez-vous d'indifférence comme d'un manteau, la voilà la clef de la libération de nos jours.
Délivrez nous Seigneur de toute hyliophilie. Enfermez-vous, mon fils, dans votre pensée, soyez le Solitaire, construisez-vous une thébaïde dans votre propre coeur..
F:. Frustrant. Je suis dèjà suffisamment en proie à la solitude, et de plus, l'abbé, il est une autre Voie, la Voie de la Main Gauche, tantrique, de l'éveil spirituel.
l'abbé : Sans doute mon fils, mais impraticable en nos temps de la fin, l'équilibre entre les trois Ordres, laboratores, bellatores, et par dessus eux Oratores, ayant été rompu.
F:  Hélas! Possible que vous ayez raison monsieur l'abbé, dans ce monde qui n'a plus rien de tragique ! Ni de comique par voie de conséquence.
Pourtant le pire ce n'était pas la guerre..
l'abbéBellaque Matribus Detestata !
F: Tatataratata! Tant qu'il y a défi, la vie sur cette terre peut être un moyen de délivrance. Mais c'est celà même qui nous est ôté : la possibilité de la lutte, l'absence de défi.
l'abbé : Du Kulârnava-tantra..
F: J'allais le dire!
l'abbé:  Vivre le monde comme libération : "il faut que l'homme se sauve par les moyens qui assureraient sa perte" lit-on dans la Katha-Upanishad.
F:  La Cata c'est qu'on ne voit plus quels sont sont ces moyens, et quelles alliances passer.
Monsieur l'abbé, selon vous, doit on considérer les tenants du monothéisme métaphysique absolu comme des alliés possible contre le monothéisme du Marché ?
l'abbé : Ce sont des fréres ennemis, adversaires mais liés!  En france les alliés possible dans cette "mouvance" restent une minorité, à la frange de ces foules indisciplinées qui n'ont jamais su que pousser des cris et piller.  L'expansion populaire n'est considérable que hierachisée. Grêce à eux, mon fils, nous sommes revenu au sens originel de proles :  les prolétaires = les prolifiques.
F: Ceux qui usent et abusent de leur malencontreuse aptitude à se reproduire, la seule qu'ils aient reçue en partage.  Mais on ne saurait sans déchoir concentrer son aversion envers des pauvres types, manipulés par les puissances.
l'abbé: Il est vrai. .Parcere subjectis et dellabare superbos. Virgile." Epargner les faibles, abattre les superbes" !
F:  En vérité, je vous le dis, l'abbé...
l'abbé:  Felix presbiter!
F:.. c'est la bourgeoisie qui est par essence la classe subversive, qui ne peut exister sans bouleverser constamment les modes de vie, les traditions.
"La bourgeoisie a joué dans l'histoire un rôle éminemment révolutionnaire.
Partout où elle a conquis le pouvoir, elle a foulé aux pieds les relations féodales, patriarcales et idylliques. Tous les liens complexes et variés qui unissent l'homme féodal à ses "supérieurs naturels", elle les a brisés sans pitié pour ne laisser subsister d'autre lien, entre l'homme et l'homme, que le froid intérêt, les dures exigences du "paiement au comptant". Elle a noyé les frissons sacrés de l'extase religieuse, de l'enthousiasme chevaleresque, de la sentimentalité petite-bourgeoise dans les eaux glacées du calcul égoïste. Elle a fait de la dignité personnelle une simple valeur d'échange; elle a substitué aux nombreuses libertés, si chèrement conquises, l'unique et impitoyable liberté du commerce. En un mot, à la place de l'exploitation que masquaient les illusions religieuses et politiques, elle a mis une exploitation ouverte, éhontée, directe, brutale."
Marx. Le manifeste.
l'abbé: Oui, mon fils, le bourgeois, se moque du désordre dans les esprits pourvu que régne l'ordre dans ses affaires. Et la classe laborieuse, est au fond conservatrice, antagoniste à cette agitation de convultionnaires des puissants qui adorent le Veau d'Or.
F:  Monsieur l'abbé, ce qui me répugne jusqu'à l'agonie, c'est de voir ces chacals de la finance et les parasites parlementaires, leurs poux du pubis, arriver à dominer le paisible et puissant ruminant populaire, émasculé par infestation testiculaire. Ce que les guépards et les aigles de l'Ordre Ancien, n'avaient pas réussi, domestiquer le troupeau plébéien, des tiques, des blattes, de vils scolopendres y parviennent ! Les bons boeufs ne suivent plus des taureaux mais des vaches multicores au méat béant, aux mamelles flétries, ainsi se laissent bouffer tout vifs par des raclures de bidet!
l'abbé: Quelle ménagerie mon fils! Ce karma de colère, pris dans l'épaisseur hyllique de vos analogies animalières vous enchaîne à la manifestation dans son aspect le plus enténébré.
F: Je sombre bêtement dans le cloaque opaque de l'Âge Sombre...
l'abbé:  La Ténèbre, méphitique, plus noire que la nuit, et qui éteint tous les flambeaux.
F:  Le Trou Noir, d'où la lumière ne peut fuir.
l'abbé:  Nietzsche, le chercheur passionné de Dieu, le savait lorsqu'il s'écriait :  "ne fait-il pas plus froid? Ne voyez vous pas venir la nuit et toujours la nuit? Ne faut-il pas allumer des lanternes en plein jour?"
F:  J'hallucine auditivement! Nietzsche chercheur de dieu! Lui, le trouvère de l'être, qui a clamé la décomposition du grand clamsé métaphysique! Récupération, l'abbé!
l'abbé : La dimension métaphysique vous échappe, mon fils mécréant, tout entier dans l'immanence.
F:  Permettez moi l'abbé de vous citer Voltaire:  " Quand celui qui parle ne se comprend plus, quand celui qui écoute n'est plus à la conversation, on appelle cela de la métaphysique ".
l'abbé:  Je ne comprends pas, mon fils, ces facilités qui vous viennent, par gôut de faire ou de citer un "bon mot", et vous ravalent au rang du scepticisme vulgaire, comme monsieur de Voltaire.
F :  J'ai la répréhensible habitude de plaisanter jusque dans mon malheur, et puis, l'abbé, le zéphir d'un sourire vient de caresser un bref instant votre face de carême. Reconnaissez que c'est drôle.
l'abbé:  Le hideux ricanement de Volataire, devenue l'ironie du bobo, le talent en moins.
F: On ne voit rien de si ordinaire aux bigots que de persifler Voltaire! Soudain, à l'énoncé de ce simple nom, ils prennent la mouche et comme eux, vous vous rapetissez à ce bourdonnement de cuistres bedonnants! Vous, si ascétique et profond. Croyez moi, relisez le, Voltaire est des nôtres, il avait des dégoûts très sûrs.
l'abbé : Vous faites allusion probablement, mon fils, à son aversion pour l'Ancien Testament, qui vous parait être une guerre déclarée contre les serviteurs du Démiurge.
F: hé! sans doute, et rejoint par là votre marcionisme il me semble..
l'abbé: ...  il y aurait beaucoup, beaucoup à dire.
F:  Et bien monsieur l'abbé prenons date, et réservons ces agapes intellectuelles pour des jours pires, en un nouvel entretien, cependant que celui-ci va s'achever  je le sens, sous les huées.
l'abbé : Mon fils, contentez vous de la bonne conscience du devoir accompli et dites comme le pauvre Romain:
populus me sibilat, at mihi plaudo
Ipse domi simul ac nummos contemplar in arca
F: Amen.

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