vendredi 13 juin 2008

Quatrième Entretien ****

Félix Niesche : Monsieur l'Abbé, que pensez vous de mon Taedium Vitae ?
L'Abbé Tymon de Quimonte:  Mon fils, quand le Dégoût que nous avons pour le monde n'est pas un effet de la Grâce, mais de cette mélancolie clairvoyante, il nous ramène bien à nous-mêmes, mais ne conduit point vers Dieu.
F: Au delà de ma lassitude, j'ai voulu entrer dans l'étude de la comparaison (qui n'est pas raison), entre l'amour, viscéral, de la femme et celui, sidéral, du poète, et qui sont sur des plans aussi différents que le cygne, volatile, et Le Cygne, constellation Stellaire.

L'Abbé : Le cygne, un gracieux palmipède grégaire, mais le Cygne, qui le voit qui le connaît ?
F:  Avez vous remarqué, monsieur l'Abbé, le palmipède ailé avec lequel j'ai illustré mon chef d'oeuvre? Ne dirait-on un Ange du Paradis?
L'Abbé:  Je ne possède nullement sur ce sujet, les anges, la science de Jacobus de Terramo,de l'Abbé Pascal, ni de Saint Innocent VIII , auteur de la Bulle "Summis desiredantes affectibus"....
F: ...Ah ouais, c'est assez léger de votre part...
L'Abbé : ..mais je sais au moins une chose : c'est que cet Être Céleste doit rendre visible à l'âme ce que l'opacité du monde sensible lui dissimule ? Or, il me semble, sans vouloir présumer ce qu'une pareille créature élève en vous, que les seules choses qu'elle rend visibles sont...celles qu'elle ne dissimule point.
F: N'est-ce pas ! En attendant, si tous les anges lui ressemblaient il y aurait pléthore de vocations.
Au fait, monsieur l'Abbé, comment en êtes vous arrivé là, vous mêmes, sauf votre respect .
L'Abbé : Le respect n'est pas ce qui vous étouffe en ce moment , mon fils, mais pour ne pas éluder, disons en premier lieu, que lorsque l'on se nomme Tymon de Quimonte, on ne peut faire moins que de se faire abbé.
F: Celà est vrai. Et quand on se prénomme Félix d'aller faire son matou. Mais voyez vous, je suis las de toutes ces turpitudes, comment se colleter encore avec le poids d’un Monde qui tout entier me nie.
Je coule à pic et mon blog se glace. Pût- il jamais heurter le Titan-nique-ta-mère, et l’envoyer par le fond ?
L'abbé: Vœu pieux, vœu pour rire : de quel poids seront jamais tous les impondérables blogs de glace face à la Pesanteur sans grâce ? Le Kali-Yuga, est une époque fatale aux natures comme la vôtre. Ne vous déplaise vous appartenez de race, de race spirituelle s'entend, à l'Ordre Ancien, à la Tradition, oui même un anarchiste comme vous..
F:  Je suis un anarchiste par rapport à cette société de m..., à l’instar d’Antonin Artaud "parce que j'aime tellement l'Ordre que je n'en supporte pas la parodie". Ce monde est une parodie de monde, une caricature grotesque.
Une brute S.A, en 1933, après un banquet de choucroute trop arrosé de bière s’endort lourdement et fait un mauvais rêve : c’est notre monde ! Chacun s'ingénie à ressembler à la pire caricature que l'on faisait alors de sa communauté, de son genre, de sa religion, de sa race, de ses penchants sexuels.
Cette époque est une époque fausse, une parodie, elle n'aurait jamais dû être, elle n'a pas le sceau du réel. Nous sommes tombés dans une impasse du continuum espace-temps, un univers- égout dans une dimension improbable.
L'abbé : Mon fils, on ne peut opposer ce qui aurait dû être à ce qui est. Tout est indissolublement lié, la Réalité et l'Idée, et ce qui est, est ce qui doit être, et si ce qu'il y a est si contraire à l'idée du Vrai, du Bien, du Beau, cela a un sens, car les Temps ne sont pas achevés. Le fondement des choses est un résultat. Le sens viendra plus tard.
F : Hégélien en diable l'abbé! Si je vous suis bien, par exemple, le string est dans le fondement car le fondement du string c'est de l'avoir dans le cul.
l'abbé : Excessivement drôle, mon fils libidineux.
F: Pourtant à l'époque, bénie, de la Petite Culotte, la raison d'être du monde était encore la quête des fondements, dessous.  Mais quelle est la raison d'être de ce monde?
l'abbé : Il est un résultat qui n'a pas de cause efficiente, il ne réalise aucun but préalable. Il n'est, si vous voulez que l'accélération de la Chute. Mais si l'apparaître de l'univers se produit, ce ne peut être qu'en vertu d'une Nécessité absolue. Seul le Tout, Dieu, est réel. Or, on ne peut concevoir jamais le Tout. Donc ce qu'on voit peut passer pour un spectacle irréel.
F: Pour vous une Nécessité, ergo une légitimité, fait le fond des choses : cette époque est dissolution mais elle aurait sa raison d'être. Pas d'accord. Tout est absurde et contingent, tout aurait pu être tout autre chose et cela aurait eu tout autant de sens.
L'abbé : De tout ce que vous pensez là, au Nihilisme, il n'y a qu'un pas.
F : J'en serais au désespoir.
L'abbé : En attendant, cette surrection de votre esprit est vaine, car votre vision est dépourvue de toute échappatoire. Si nous sommes dans ce Trou Noir, nous y sommes faits comme des rats. Nulle fuite hors de cette bolge puante : elle est tout ce qu'il y a. Or, tout est miraculeusement mauvais en ces sales temps : c'est sur cette "perfection" à rebours qu'il vous faut faire fonds. Cet âge, le Dernier, l'âge Sombre, prévu et décrit par la Tradition, ira à son terme et finira, et avec lui le Temps qui est Chute dans la Matière. Élevons notre esprit au delà. Qu'en deçà toute chose soit horrible et répugnante n'est-ce point nous aider à quitter joyeusement ce monde vers le royaume de Notre Père, notre Vrai Père? Nous délasserons alors nos coeurs exténués, notre conscience douloureuse, nos esprits humiliés.
F: Je ne crois dans nulle transcendance, je me passe des arrière-mondes. Les hommes, mâles et femelles sont en train de se re-singer : telle est la Chute, descente dans l'animalité. Ce spectacle, cette promiscuité est la plus abjecte de toute l'Histoire.
Pourtant, un ciel d'été, la mer, me suffoquent encore de leur déchirante splendeur. Je ne peux rien vouloir d'autre que leur beauté concrète et singulière. Ô mon Père, j'aurais pu tant aimer la vie, en d'autres Temps, en d'autres compagnies.
L'abbé : Mais ce ciel d'été avec ses étoiles admirables, cette mer de saphir, ces sources, quand les voyez vous ? Vous ne quittez jamais votre gourbi parisien. La Voie Lactée, les Galaxies, mais ce sont dans vos Traités d'astrophysique que vous les révérez et si vos étoiles sont d'onyx c'est à cause de la rime mallarméenne en X. La mer, avec madame votre Mère, vous ne lui rendez visite qu'une fois l'an, l'été. 
Cette "Splendeur qui vous suffoque", mon fils, c'est la Nostalgie de votre Lointaine Patrie Véritable. La vraie vie est absente dit le poète. Ici bas, maintenant, c'est nous, nos oeuvres et ce que nous aimions plus que tout, la France, qui disparaissons, incompris, bafoués, solitaires, intestats.
F: Génial l'Abbé! Vous avez l'art de me remonter le moral !
L'Abbé: Je ne cherchais nullement à vous démoraliser mon Fils.
F: Ah tant mieux, mais c'était bien imité.
l'abbé: Sans doute n'ai-je pas, pauvre mortel, les clefs du Paradis, mais je voudrais vous faire pressentir,en dehors du tumulte de l'avilissante vie,  l'Eternité, son grand calme immuable, son ample respiration cosmique, comme une mer infinie expirant à jamais nos tourments.
F: Le Nirvânah, quelques gouttes d'opium pour ce félix infelicidad.
L'abbé: Si consistant adversum mia castra, non timebit cor meum.
F: Amen.

1 commentaire:

orfeenix a dit…

En concerto pour string, avec ou sans culotte, c' est toujours le même fondement crée par Dieu et c' est l' origine du monde :-)

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